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Taille : 4820 km de diamètre
Masse : 1,075×1023 kg
Distance depuis la Terre : 628 Millions de km
Température : -140°C
1 jour / année sur Callisto : 16 jours terrestres (rotation synchrone)
Missions vers Callisto : Galileo
Surface : Très cratérisée
La lune Callisto est une originale dans le système jovien. C’est le satellite naturel le plus éloigné de Jupiter parmi les quatre lunes galiléennes historiquement découvertes par l’illustre savant. Elle en est si éloignée, et si distante de ses trois sœurs Io, Europe et Ganymède, qu’elle fait bande à part.
Seule des quatre grandes lunes à ne pas être en résonance orbitale autour de la géante gazeuse, elle apparaît aussi comme très âgée et peu dynamique en surface. Une vieille lune en quelque sorte. Toute ridée, le mot n’est pas si faux, comme notre lune terrestre, mais d’un bon tiers de plus de diamètre.
En réalité, sa surface est saturée de cratères, probablement la plus cratérisée du système solaire. Curieux pour la nymphe « la plus belle ». À sa manière, elle nous réserve des surprises originales. Son aspect yin et yang provoqué par sa face claire et sa face sombre. Et beaucoup de tâches brillantes.
Callisto cache son jeu : une atmosphère ténue et peut-être un grand océan souterrain. Prétendante challenger parmi ses consœurs joviennes à abriter une forme primitive de vie, elle pourrait présenter une chimie prébiotique. Et peut-être un jour humaine : des études très sérieuses envisagent d’en faire une sorte de camp de base pour l’exploration lointaine.
Une découverte précoce qui fut un temps controversée
Il est tout à fait possible que les Chinois, fameux astronomes, aient devancé les Européens pour découvrir les lunes de Jupiter. Avec des moyens rudimentaires d’occultation, Gan De aurait pu les observer en 362 av J-C.
En 1610, il est certain que Galilée repère les quatre principales lunes de Jupiter à la lunette, dont la lointaine Callisto. Il la nommera donc Jupiter IV. L’astronome allemand Simon Marius, à la renommée sulfureuse pour des affaires de plagiat, affirmera dans un ouvrage de 1614 avoir précédé Galilée de quelques jours.
Dans les faits, ses observations sont postérieures et Galilée gardera la primauté de la découverte. Tardivement, ce sont pourtant les noms issus de la mythologie proposés par Marius qui s’imposeront, et Jupiter IV sera communément appelée Callisto, la nymphe très belle séduite par Zeus et poursuivie par la colère d’Artemis.
Ce choix reste mal compris et Marius, pourtant prompt à prendre les écrits des autres à son compte, l’attribuera plus ou moins à Kepler. De grands noms se seront penchés sur le berceau de la lune Callisto.
Une apparence faussement changeante
Si Callisto est connue depuis si longtemps, c’est que malgré une magnitude faible, c’est la troisième lune en taille du système solaire après sa consœur Ganymède et Titan. Elle est même presque de la taille de Mercure. En rotation synchrone avec Jupiter, elle lui montre toujours la même face, ce qui est très courant.
Sa période de révolution propre est de 16,7 jours terrestres, et son inclinaison très faible. Elle a défrayé la chronique scientifique au XIXe siècle, passionnant les astronomes qui lui trouvaient une surface changeante. Callisto semblait changer d’allure et de luminosité au fil des observations, et certains lui ont même trouvé une forme externe hexagonale !
C’étaient de simples illusions d’optique liées à la faiblesse des appareils de l’époque. Aujourd’hui des jumelles performantes permettent de déceler ponctuellement les quatre lunes, mais la distance reste immense pour scruter avec précision des détails. Callisto se trouve à 1,8 million de km de Jupiter, lui-même à 600 millions au minimum de nous.
Ce sont surtout plusieurs missions spatiales qui permettront de bien visualiser la surface de Callisto et de la cartographier jusqu’à 15 m près. Il s’agit des Pioneer 10 et 11, de Voyager 1 et 2, de Galileo qui fit huit rotations dont une à 130 km seulement, de Cassini-Huygens et plus récemment de New Horizon.
Ces missions confirmèrent une atmosphère ténue, sans manifestations visibles, une irradiation faible de la magnétosphère de Jupiter, et ne trouvèrent pas de champ magnétique propre. Un petit disque de débris a aussi été découvert.
Une surface vraiment changeante
La face avant, dans le sens de l’orbite, est plus sombre que la face arrière. Ce phénomène serait dû à une concentration de dioxyde de soufre à l’avant, et de dioxyde de carbone à l’arrière. Callisto fait l’inverse de ses trois sœurs sur ce point.
Sur les photos, Callisto scintille en quelque sorte. La formation des cratères remonterait de la glace des profondeurs lors des impacts. Si l’albédo moyen, ou fraction de lumière réfléchie, est seulement de l’ordre de 20%, celui de ces glaces est proche de 80%, provoquant un grand contraste lumineux.
Très froide, 155°K, peu illuminée, cette glace subsiste en hauteur des cratères sans être sublimée, formant comme des risées scintillantes.
Un relief immobile, ou presque, depuis très longtemps
Pas de montagnes sur Callisto, ni de canyons, ni de manifestations volcaniques. Cette uniformité indique le peu de mouvements de l’écorce, la marée galactique étant trop faible du fait de la distance à Jupiter. Ces reliefs sont très stables, à part les bouleversements soudains, mais ponctuels d’impacts de météorites.
Les cratères, eux, sont innombrables. À tel point que les impacts se superposent les uns au-dessus des autres, formant ce que l’on a nommé des palimpsestes en référence aux grattages des parchemins. Le paysage nous offre les fameux cratères annelés. Valhalla est un impact géant de 2500 km de diamètre, dont le cratère central brillant fait 600 km.
Il présente une série de dix franges circulaires, comme les vaguelettes d’un caillou tombant dans l’eau, figées pour l’éternité. Palimpseste et cratère annelé, Asgard fait 1600 km de diamètre sur lequel se superposent utgard qui fait 600 km, et le jeune cratère Burr.
Autre étrangeté, les catenae : Gipul forme plus de 600 km d’une chaîne continue rectiligne d’impacts, comme un coup de scalpel donné sans doute par le frôlement tangentiel d’une comète. Tous ces sites portent des noms de la mythologie scandinave.
Une surface inhomogène dans le détail
Il est étonnant que l’atmosphère ne disparaisse pas. Des calculs utilisant les données de Galileo indiquent que les gaz s’évaporent en quatre ans. Elle se renouvelle probablement en permanence à partir du sol qui contiendrait donc du dioxyde de soufre, du dioxyde de carbone, avec en plus probablement de l’ammoniac et des composés carbonés.
L’analyse spectrale de la surface suggère une part importante de glace d’eau, de silicates hydratés de fer et de magnésium. De près, la surface d’apparence morne n’est pas homogène. On a déjà évoqué des crêtes givrées, mais les fonds sombres des cratères évoquent des roches nues.
Une théorie développe l’idée que ces zones sombres seraient des composés carbonés, comme les astéroïdes du type D, ceux de très faible albédo. On a d’ailleurs pu détecter des concentrations plus importantes en dioxyde de carbone près des cratères jeunes comme Lofn.
Une composition interne jugée incomplète
La masse volumique et la faible densité de Callisto suggèrent que la composition globale serait répartie à parts égales d’eau et de roches. Ces dernières pourraient être proches de celles qui composent les chondrites ordinaires, la majeure partie des météorites.
Les mesures du moment d’inertie par Galileo ont un peu levé le voile sur la structure supposée : une croute de près de 100 km, un important manteau liquide ou glacé, et au centre un cœur de peut être 600 km de rayon. Ce cœur assez indifférencié ne serait pas un noyau, certainement pas un noyau ferreux. Le fer pur semble en effet peu présent, le rapport massique fer/silicium étant assez faible.
Callisto ne paraît pas, ou pas encore, avoir subi de différenciation planétaire complète, responsable des structures en couche lorsque les matériaux les plus denses s’enfoncent. Par manque d’échauffement interne probablement, empêchant la fusion des glaces.
L’hypothèse de l’océan
Les modèles de formation des lunes glacées sont encore pleins d’inconnus, mais une théorie semble l’emporter dans laquelle le manteau contiendrait un océan subglaciaire interne. Elle est étayée par certaines supputations sur la création des cratères annelés. Cet océan souterrain pourrait agir comme un gigantesque amortisseur.
Elle provient également des modèles de fusion de la glace cristalline selon certaines conditions de pression et température qui seraient réunies. L’ammoniac pourrait de plus agir comme antigel. Enfin, Galileo a détecté des perturbations du champ magnétique jovien qui pourrait provenir d’une couche d’eau salée conductrice d’au moins 10 km d’épaisseur.
Cette idée est aussi alimentée par les avancées des découvertes sur Europe et Ganymède et serait cohérente d’un continuum dans la formation des quatre lunes galiléennes. Dans cet océan, certains vont jusqu’à imaginer une forme de vie particulière prébiotique, bien qu’avec une plus faible probabilité que sur Europe, plus échauffée.
Une future base humaine ?
Le peu de radiations reçues, la stabilité du sol et son relief neutre, sa position avancée font de Callisto un candidat sérieux pour établir un relai de passage pour les recherches spatiales. Les météorites sont le danger le plus évident, mais on peut imaginer une surveillance spécifique et des procédures d’évacuation.
Cette idée futuriste n’est pas totalement folle, et a été étudiée dans le projet HOPE. Il faudrait cependant déjà y retourner, sans parler de s’y poser. Après l’abandon d’EJSM par la NASA, l’ESA semble confirmer JUICE pour explorer Jupiter et ses lunes vers 2025. La nymphe Callisto se mérite !
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