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Galilée ou Galileo Galilei (né à Pise le 15 février 1564 et mort à Arcetri près de Florence, le 8 janvier 1642) est un physicien et astronome italien du XVIIe siècle, célèbre pour avoir jeté les fondements des sciences mécaniques ainsi que pour sa défense opiniâtre de la conception copernicienne de l'univers.
Les premières années
L'enfance
Galilée, de son véritable nom Galileo Galilei, naît à Pise le 15 février 1564, fils de Vincenzo Galilei et de Giulia Ammannati di Pescia, l'aîné de leurs 7 enfants. La famille appartient à la petite noblesse et gagne sa vie dans le commerce. Vincenzo Galilei, son père, est luthier, musicien, chanteur, et auteur en 1581 d'un Dialogue de la musique moderne. Il participe à des controverses sur la théorie musicale.
Galilée fait preuve très tôt d'une grande habileté manuelle et d'un bon sens de l'observation. Enfant, il s'amuse à réaliser les maquettes de machines qu'il a aperçues.
Il est éduqué chez ses parents jusqu'à l'âge de 10 ans. Ceux-ci déménagent alors à Florence et le confient à un prêtre du voisinage. Par la suite, Galilée entre au couvent de Santa Maria de Vallombrosa et y reçoit une éducation religieuse. Poussé au noviciat par ses maîtres, il ne poursuit pas sa carrière ecclésiastique très longtemps : son père, profitant d'une maladie des yeux de son fils, le ramène à Florence en 1579.
Deux ans plus tard, Vincenzo Galilei l'inscrit à l'université de Pise où il suit des cours de médecine (sur les traces d'un de ses glorieux ancêtres, le magister Galilaeus de Galilaeis, 1370 - ~1450), mais sans y porter de l'intérêt. Il revient à Florence en 1585 sans avoir fini ses études ni obtenu son diplôme.
La découverte de sa vocation
Dès 1583, Galilée est initié aux mathématiques par Ostilio Ricci, un ami de la famille, élève de Tartaglia. Bien que Ricci soit un savant peu renommé, il a l'habitude, rare à l'époque, de lier la théorie à la pratique par l'expérience.
A l'âge de dix-neuf ans, observant dans la cathédrale de Pise une lampe qui se balançait à la voûte, et remarquant que les oscillations en étaient isochrones, il eut l'idée d'appliquer le pendule à la mesure du temps. Toutefois, ce ne fut qu'à la fin de sa vie, dans un ouvrage publié en 1638, qu'il exposa cette découverte.
Ébloui par l'œuvre d'Euclide, n'ayant aucun goût pour la médecine et encore moins pour les disputes scolastiques et la philosophie aristotélicienne, Galilée réoriente ses études vers les mathématiques. Dès lors, il se réclame de Pythagore, de Platon et d'Archimède et contre l'aristotélisme. Encore étudiant, il découvre la loi de l'isochronisme des pendules, première étape de ce qui sera la découverte d'une nouvelle science : la mécanique. Dans le courant humaniste, il rédige aussi un pamphlet féroce sur le professorat de son temps. Toute sa vie, Galilée refuse d'être comparé aux professeurs de son époque, ce qui lui vaudra d'avoir de nombreux ennemis.
Deux ans plus tard, il est de retour à Florence sans diplôme, mais avec de grandes connaissances et une grande curiosité scientifique.
De Florence à Pise (1585-1592)
Galilée commence par démontrer plusieurs théorèmes sur le centre de gravité de certains solides dans son Theoremata circa centrum gravitatis solidum et entreprend en 1586 de reconstituer la balance hydrostatique d'Archimède ou Bilancetta[1]. En même temps, il poursuit ses études sur les oscillations du pendule pesant et invente le pulsomètre. Cet appareil permettait d'aider à la mesure du pouls et fournissait un étalon de temps, qui n'existait pas à l'époque. Il débute aussi ses études sur la chute des corps.
En 1588, il est invité par l'Academia Fiorentina à présenter deux leçons sur la forme, le lieu et la dimension de l'Enfer de Dante.
Parallèlement à ses activités, il cherche un emploi de professeur dans une université, il rencontre alors, entre autres grands personnages, le père jésuite Christophorus Clavius, sommité des mathématiques au Collège pontifical. Il rencontre aussi le mathématicien Guidobaldo del Monte. Ce dernier recommande Galilée au duc Ferdinand Ier de Toscane, qui le nomme à la chaire de mathématique de l'université de Pise pour 60 écus d'or par an, une misère. Sa leçon inaugurale a lieu le 12 novembre 1589.
En 1590 et 1591, il découvre la cycloïde et s'en sert pour dessiner des arches de ponts.
Il expérimente également sur la chute des corps et rédige son premier ouvrage de mécanique, le De motu. La réalité même de ces « expériences » est aujourd'hui largement mise en doute et serait une invention de son premier biographe, Vincenzo Viviani. Ce volume contient des idées nouvelles pour l'époque, mais il expose encore, bien évidemment les principes de l'école aristotélicienne et le système de Ptolémée. Galilée les enseigne d'ailleurs longtemps après avoir été convaincu de la justesse du système copernicien, faute de preuves tangibles.
L'université de Padoue (1592-1610)
En 1592, Galilée part enseigner à l'université de Padoue où il reste 18 ans. Le départ de Pise, après seulement 3 ans, s'explique par un différend l'opposant à un fils du grand-duc Ferdinand Ier de Toscane.
Padoue appartenait à la puissante République de Venise, ce qui garantissait à Galilée une grande liberté intellectuelle, l'Inquisition y étant très peu puissante. Même si Giordano Bruno avait été livré à l'Inquisition par les patriciens de la République, Galilée pouvait effectuer ses recherches sans trop de soucis. Venise est alors très réputée pour son arsenal, ce qui offre à Galilée de grandes possibilités. Détail qui a son importance, la ville est également célèbre pour la qualité de son industrie verrière.
Il enseigne la mécanique appliquée, les mathématiques, l'astronomie et l'architecture militaire. Il professait alors publiquement le système de Ptolémée, n'osant pas encore s'insurger contre les idées admises, bien qu'ayant déjà adopté personnellement le système de Copernic. Ses leçons de mécanique eurent un succès considérable, et le Père Mersenne publiait en France en 1674 les Méchaniques de Galilée.
Depuis la mort de son père en 1591, Galilée doit subvenir aux besoins de la famille. Il est accaparé par ses tâches d'enseignement : il donne de nombreux cours particuliers à de riches étudiants qu'il héberge chez lui. Mais il est piètre gestionnaire et seule l'aide financière de ses protecteurs et amis lui permet d'équilibrer ses comptes.
En 1593, il rédige le Trattato di Forticazioni et le Trattato di Meccaniche à l'intention de ses étudiants de cours particuliers. Les travaux de Galilée permettent une meilleure efficacité de l'artillerie lourde (ils établissent qu'un canon devait être pointé à 45° pour avoir sa portée maximale) et ne font l'objet d'aucune contestation.
En 1597, il améliore et fabrique un compas de proportion, le compas géométrique et militaire, ancêtre de la règle à calcul, qui connaît un grand succès commercial. Il n'en rédige le mode d'emploi que neuf ans plus tard.
En 1599, Galilée participe à la fondation de l’Accademia dei Ricovrati avec l’abbé Federico Cornaro.
La même année, Galilée rencontre Marina Gamba, une jeune Vénitienne issue de famille modeste qui a déjà des enfants avec laquelle il entretient une liaison jusqu'en 1610 (ils ne sont pas mariés et ne vivent pas sous le même toit). En 1600, sa première fille Virginia naît, suivie par sa sœur Livia en 1601, puis un fils, Vincenzo, en 1606. Après la séparation (non conflictuelle) du couple, Galilée se charge des enfants. Il place plus tard ses filles au couvent à Arcetri, Virginie deviendra sœur Marie Céleste car fille d'un homme fasciné par les étoiles.
L'année 1604
1604 est une année mirabilis pour Galilée :
- En juillet, il teste sa pompe à eau dans un jardin de Padoue.
- En octobre, il découvre la loi du mouvement uniformément accéléré, qu'il associe à une loi des vitesses erronées.
- En décembre, il débute son observation d'une nova connue depuis le 10 octobre au moins. Il consacre 5 leçons sur le sujet le mois suivant, et en février 1605 il co-publie Dialogo de Cecco di Ronchitti in Perpuosito de la Stella Nova avec Girolamo Spinelli. Bien que l'apparition d'une nouvelle étoile, et sa disparition soudaine, entre en totale contradiction avec la théorie établie de l'inaltérabilité des cieux, Galilée reste encore aristotélicien en public, mais il est déjà fermement copernicien en privé. Il attend la preuve irréfutable sur laquelle s'appuyer pour dénoncer l'aristotélisme.
Reprenant ses études sur le mouvement, Galilée « montre » que les projectiles suivent, dans le vide, des trajectoires paraboliques. Il faudra la théorie de la gravitation universelle de Newton, pour pouvoir la généraliser aux missiles balistiques, dont les trajectoires sont en fait elliptiques.
De 1606 à 1609
En 1606, Galilée construit son premier thermoscope, premier appareil de l'histoire permettant de comparer de façon objective le niveau de chaud et de froid. Cette même année, Galilée et deux de ses amis tombent malades le même jour d'une même maladie infectieuse. Seul Galilée survit, mais il restera perclus de rhumatismes pour le restant de ses jours.
Dans les deux années qui suivent, le savant étudie les armatures d'aimants. On peut encore voir ses travaux au musée d'Histoire de la Science (Musée de la Storia della Scienza) de Florence.
La lunette et ses conséquences
Perfectionnement de la lunette astronomique
En mai 1609, Galilée (ou plutôt Paolo Sarpi ?) reçoit de Paris une lettre du Français Jacques Badovere, l'un de ses anciens étudiants, qui lui confirme une rumeur insistante : l'existence d'une lunette permettant de voir les objets éloignés. Fabriquée en Hollande, cette lunette aurait déjà permis de voir des étoiles invisibles à l'œil nu. Sur cette seule description, Galilée, qui ne donne plus de cours à Cosme II de Médicis, construit sa première lunette. Contrairement à la lunette hollandaise, celle-ci ne déforme pas les objets et les grossit 6 fois, soit deux fois plus que sa concurrente. Il est aussi le seul à l'époque à réussir à obtenir une image droite grâce à l'utilisation d'une lentille divergente en oculaire. Cette invention marque un tournant dans la vie de Galilée.
Le 21 août, venant à peine de terminer sa deuxième lunette (elle grossit huit ou neuf fois), il la présente au Sénat de Venise. La démonstration a lieu au sommet du Campanile de la place Saint-Marc. Les spectateurs sont enthousiasmés : sous leurs yeux, Murano, située à 2,5 km semble être à 300 m seulement.
Galilée offre son instrument et en lègue les droits à la République de Venise, très intéressée par les applications militaires de l'objet. En récompense, Galilée est confirmé à vie à son poste de Padoue et ses gages sont doublés. Il est enfin libéré des difficultés financières.
Il faut cependant signaler que, contrairement à ses allégations, Galilée ne maîtrisait pas la théorie optique et que les instruments fabriqués sont de qualité très variable. Certaines lunettes sont pratiquement inutilisables (en tout cas en observation astronomique). En avril 1610, à Bologne, par exemple, la démonstration de la lunette est désastreuse, ainsi que le rapporte Martin Horky dans une lettre à Kepler.
Galilée lui-même reconnaissait, en mars 1610, que, sur plus de 60 lunettes qu'il avait construites, quelques-unes seulement étaient adéquates. De nombreux témoignages, y compris celui de Kepler, confirment la médiocrité des premiers instruments.
L'observation de la Lune
Pendant l'automne, Galilée continue à développer sa lunette. En novembre, il fabrique un instrument qui grandit une vingtaine de fois. Il prend le temps de tourner sa lunette vers le ciel. Très vite, en observant les phases de la lune, il découvre que cet astre n'est pas parfait comme le voulait la théorie aristotélicienne.
La physique aristotélicienne, qui faisait autorité à l'époque, distinguait deux mondes :
- le monde « sublunaire » : comprenant la Terre et tout ce qui se trouve entre la Terre et la Lune ; dans ce monde tout est imparfait et changeant ;
- le monde « supralunaire » : qui part de la Lune et s'étend au-delà. Dans cette zone, il n'existait plus que des formes géométriques parfaites (des sphères) et des mouvements réguliers immuables (circulaires).
Galilée quant à lui, observa une zone transitoire entre l'ombre et la lumière, le terminateur, qui n'était en rien régulière, ce qui par conséquent invalidait la théorie aristotélicienne. Galilée en déduit l'existence de montagnes sur la Lune et estime même leur hauteur à 7 000 mètres, davantage que la plus haute montagne connue à l'époque. Il faut dire que les moyens techniques de l'époque ne permettaient pas de connaître l'altitude des montagnes terrestres sans fantaisie. Quand Galilée publie son Sidereus Nuncius (Messager Céleste), il pense que les montagnes lunaires sont plus élevées que celles de la Terre, bien qu'en réalité elles soient équivalentes.
La tête dans les étoiles
En quelques semaines, il découvre la nature de la Voie lactée, dénombre les étoiles de la constellation d'Orion et constate que certaines étoiles visibles à l'œil nu sont en fait des amas d'étoiles. Il étudie également les tâches solaires.
Le 7 janvier 1610, Galilée fait une découverte capitale : il remarque 3 petites étoiles à côté de Jupiter. Après quelques nuits d'observation, il découvre qu'elles sont quatre et accompagnent la planète. Ce sont les satellites de Jupiter, qu'il nomme les étoiles Médicées. Ils seront nommés Callisto, Europe, Ganymède et Io (aujourd'hui baptisés lunes galiléennes) par Simon Marius, qui en revendiquera également la découverte plusieurs années après. Le 4 mars 1610, il publie à Florence ses découvertes dans Le Messager des étoiles (Sidereus Nuncius), résultat de ses premières observations stellaires.
Pour lui, Jupiter et ses satellites sont un modèle du système solaire. Grâce à eux, il pense pouvoir démontrer que les « orbes de cristal » d’Aristote n'existent pas et que tous les corps célestes ne tournent pas autour de la Terre. C'est un coup très rude porté aux aristotéliciens. Il corrige aussi certains coperniciens qui prétendent que tous les corps célestes tournent autour du Soleil (sauf la Lune).
Afin de se protéger du besoin et sans doute désireux de retourner à Florence, Galilée rebaptise les satellites de Jupiter qui sont pour quelque temps les « astres médicéens », en l'honneur de Cosme II de Médicis, son ancien élève et grand-duc de Toscane. Galilée a hésité entre Cosmica sidera et Medicea sidera. Le jeu de mots « Cosmica = Cosme » est évidemment volontaire et c'est seulement après la première impression qu'il retient la deuxième dénomination.
Le 10 avril, il fait observer ces astres à la cour de Toscane. C'est le triomphe. Le même mois, il donne trois cours sur le sujet à Padoue. Toujours en avril, Johannes Kepler offre son soutien à Galilée. L'astronome allemand ne confirme pas vraiment cette découverte puisqu'il n'a pas encore eu accès à la lunette, il offre seulement une dissertation-discussion (enthousiaste pour son aspect copernicien) sur la pertinence du petit ouvrage de Galilée. C'est la Dissertatio cum Nuncio Sidereo où même la question de l'impact sur les fondements de l'astrologie est abordée (ces nouvelles planètes invalident-elles l'astrologie de la tradition ? Question remise au goût du jour depuis 2006 avec l'actualité des planétoïdes plutoniens et le déclassement de Pluton). En septembre 1610, Kepler publie sa Narratio, un compte-rendu court et précis de l'observation des compagnons de Jupiter : c'est là qu'il crée le néologisme "satellite" (garde du corps en latin). En effet, si l'on ajoutait des "planètes" au système solaire, son système des 5 solides (1596, Mysterium Cosmographicum) serait invalidé...
A noter que Galilée ne lui fit jamais parvenir une seule lunette, et ce malgré son soutien officiel en tant qu'Astronome Impérial. L'observation des satellites de Jupiter n'a pu avoir lieu que par l'emprunt d'une lunette (qu'il eut à disposition une ou deux nuits seulement). Galilée, en effet, s'est toujours méfié des écrits keplériens faisant une part belle à l'astrologie, à l'Écriture Sainte (Kepler est protestant et théologien de formation) ou, à partir de 1609, à des ellipses et des forces dans le système solaire. Galilée qualifiera même de puérile l'idée d'une attraction mutuelle entre les eaux des mers et la Lune... rappelant trop la symbolique astrologique.
Observations à Florence, présentation à Rome
Le 10 juillet 1610, Galilée quitte Venise pour Florence.
Malgré l'avis de ses amis Fra Paolo Sarpi et Nicolò Sagredo, qui craignent que sa liberté ne soit bridée, il a, en effet, accepté le poste de Premier Mathématicien de l'Université de Pise (sans charge de cours, ni obligation de résidence) et celui de Premier Mathématicien et Premier Philosophe du grand-duc de Toscane.
Le 25 juillet 1610, Galilée tourne sa lunette astronomique vers Saturne et découvre son étrange apparence : oOo (les oreilles de Saturne, dit-on alors). Mais c'est seulement 50 ans plus tard et avec des instruments plus puissants que Christiaan Huygens comprendra la nature des anneaux de Saturne.
Galilée protégera la paternité de sa découverte en incluant dans ses écrits une phrase codée, une devinette pour lui servir de témoin : SMAISMRMILMEPOETALEVNIPVENGTTAVIRAS qui contient la phrase latine : Altissumum Planetam tergeminum observavi (J'ai découvert que la planète plus haut placée était triple), énigme qu'il dévoilera plus tard.
Le mois suivant, Galilée trouve une astuce pour observer le Soleil à la lunette et découvre les taches solaires. Il en donne une explication satisfaisante.
En septembre 1610, poursuivant ses observations, il découvre les phases de Vénus. Pour lui, c'est une nouvelle preuve de la vérité du système copernicien, car s'il est facile d'interpréter ce phénomène grâce à l'hypothèse héliocentrique, il est beaucoup plus difficile de le faire à l'aide de l'hypothèse géocentrique.
Il est invité le 29 mars 1611 par le cardinal Maffeo Barberini (futur Urbain VIII) à présenter ses découvertes au Collège pontifical de Rome et à la jeune Académie des Lynx. Galilée reste dans la capitale pontificale un mois complet, durant lequel il reçoit tous les honneurs. L'Académie des Lynx notamment, lui réserve un accueil enthousiaste et l'admet en tant que 6e membre. Dorénavant, le lynx de l'Académie ornera le frontispice de toutes les publications de Galilée.
Le 24 avril 1611, le Collège romain, composé de jésuites et dont Christophorus Clavius est le membre le plus éminent, confirme au cardinal Bellarmin que les observations de Galilée sont exactes. Cependant, les savants se gardent bien de confirmer ou d'infirmer les conclusions que le Florentin en a tirées.
Galilée retourne à Florence le 4 juin.
Galilée attaqué et condamné par les autorités
L'opposition s'organise
Galilée semble voler de succès en succès et convaincre tout le monde. Pourtant, les partisans de la théorie géocentrique selon Aristote sont devenus ses ennemis acharnés et les attaques contre lui ont commencé dès la parution du Sidereus Nuncius. Ils ne peuvent pas se permettre de perdre la face et ne veulent pas voir leur science remise en question.
De plus, les méthodes de Galilée, basées sur l'observation et l'expérience plutôt que sur l'autorité des partisans des théories géocentriques (qui s'appuyaient sur le prestige d'Aristote), sont en opposition complète avec les leurs, à tel point que Galilée refuse d'être comparé à eux.
D'abord, ce ne sont que des escarmouches. Mais Nicolò Sagredo écrit tout de même à Galilée, fraîchement arrivé à Florence :
« La puissance et la générosité de votre prince (le grand-duc de Toscane) permettent d'espérer qu'il saura reconnaître votre dévouement et votre mérite ; mais dans les mers agitées des cours, qui peut éviter d'être, je ne dirai pas coulé, mais au moins durement secoué par les rafales furieuses de la jalousie ? »
La première flèche vient de Martin Horky, disciple du professeur Giovanni Antonio Magini et ennemi de Galilée. Cet assistant publie en juin 1610, sans consulter son maître, un pamphlet contre le Sidereus Nuncius. Hormis les attaques personnelles, son argument principal est le suivant :
« Les astrologues ont fait leurs horoscopes en tenant compte de tout ce qui bougeait dans les cieux. Donc les astres médicéens ne servent à rien et, Dieu ne créant pas de choses inutiles, ces astres ne peuvent pas exister. »
Il est ridiculisé par les partisans de Galilée, qui répondent que ces astres servent à une chose : faire enrager Horky. Devenu la risée de toute l'université, Horky est finalement chassé par son maître : Giovanni Antonio Magini ne tolère pas un échec aussi cuisant. Au mois d'août, un certain Sizzi tente le même genre d'attaque avec le même genre d'arguments, sans plus de succès.
Une fois les observations de Galilée confirmées par le Collège romain, les attaques changent de nature. Ludovico Delle Combe attaque sur le plan religieux en demandant si Galilée compte interpréter la Bible pour la faire s'accorder à ses théories. À cette époque en effet, et avant les travaux exégétiques du XIXe siècle, le psaume 93 (92) laissait entendre une cosmologie géocentrique (dans la ligne : « Tu as fixé la terre ferme et immobile. »)
Les attaques se font plus violentes
Galilée, de retour à Florence, est inattaquable sur le plan astronomique. Ses adversaires vont donc critiquer sa théorie des corps flottants. Galilée prétend que la glace flotte parce qu'elle est plus légère que l'eau, alors que les aristotéliciens pensent que c'est dans sa nature de flotter. (Physique quantitative et mathématique de Galilée contre physique qualitative d'Aristote). L'attaque aura lieu durant un repas à la table de Cosme II au mois de septembre 1611.
Galilée est opposé aux professeurs de Pise et notamment à Delle Combe lui-même, durant ce qu'on appelle la « bataille des corps flottants ». Galilée réalise l'expérience et sort victorieux de l'échange. Quelques mois plus tard, il en tirera un opuscule où il présente sa théorie.
En dehors de ces démêlés, Galilée continue ses recherches. Son système de détermination des longitudes par l'observation de la position des satellites de Jupiter est proposé à l'Espagne par l'ambassadeur de Toscane.
En 1612, il entreprend une discussion avec « Apelles latens post tabulam » (pseudonyme du jésuite Christophe Scheiner), un astronome allemand, au sujet des taches solaires. Apelles défend l'incorruptibilité du Soleil en arguant que les taches sont en réalité des amas d'étoiles entre le Soleil et la Terre. Galilée démontre que les taches sont soit à la surface même du Soleil, soit si proches qu'on ne peut mesurer leur altitude. L'Académie des Lynx publiera cette correspondance le 22 mars 1613 sous le titre d'Istoria e dimostrazioni intorno alle marchie solari e loro accidenti. Scheiner finira par adhérer à la thèse galiléenne.
Le 2 novembre 1612, la querelle reprend. Le dominicain Niccolo Lorini, professeur d'histoire ecclésiastique à Florence, prononce un sermon résolument opposé à la théorie de la rotation de la Terre. Sermon sans conséquence particulière, mais qui marque les débuts des attaques religieuses. Les opposants utilisent le passage biblique (Josué 10, 12-14) dans lequel Josué arrête la course du Soleil et de la lune, comme arme théologique contre Galilée.
En décembre 1613, le professeur Benedetto Castelli, ancien élève de Galilée et un de ses collègues à Pise, est sommé par la grande-duchesse douairière Christine de Lorraine de prouver l'orthodoxie de la doctrine copernicienne. Galilée viendra en aide à son disciple en lui écrivant une lettre le 21 décembre 1613 (traduite dans "Galilée, dialogues et lettres choisies", 1966, Hermann) sur le rapport entre science et religion, affirmant que dans le domaine des phénomènes physiques, l'Écriture Sainte n'a pas de juridiction. La grande-duchesse est rassurée, mais la controverse ne faiblit pas.
Galilée cependant, continue ses travaux. Du 12 au 15 novembre, il reçoit Jean Tarde, à qui il présente son microscope et ses travaux d'astronomie. En 1614, il fait la connaissance de Jean-Baptiste Baliani, physicien génois, qui sera son ami et correspondant pendant de longues années.
La censure de la thèse copernicienne (1616)
Le 20 décembre, le père Caccini attaque très violemment Galilée à l'église Santa Maria Novella. Le 6 janvier 1615, un copernicien, le carmélite Paolo Foscarini, publie une lettre traitant positivement de l'opinion des pythagoriciens et de Copernic sur la mobilité de la Terre. Il envisage le système copernicien en tant que réalité physique. La controverse prend une telle ampleur que le cardinal Bellarmin, pourtant favorable à Galilée, est obligé d'intervenir le 12 avril. Il écrit une lettre à Foscarini où il condamne sans équivoque la thèse héliocentrique en l'absence de réfutation concluante du système géocentrique. Tout en reconnaissant l'intérêt pratique, pour le calcul astronomique, du système de Copernic, il déclarait formellement imprudent de l'ériger en vérité physique.
En réaction, vers avril 1615, Galilée écrit à Christine de Lorraine une longue lettre dans laquelle il développe admirablement ses arguments en faveur de l'orthodoxie du système copernicien. Galilée y explique que « l'intention du Saint-Esprit est de nous enseigner comment on doit aller au ciel, et non comment va le ciel ». On y voit par ailleurs les passages des Écritures qui posaient problème d'un point de vue cosmologique. Cette lettre est, elle aussi, largement diffusée. Pour Galilée, c'était accepter le déplacement du débat sur le terrain de la foi.
Malgré cela, Galilée est obligé de se rendre à Rome pour se défendre contre les calomnies et surtout essayer d'éviter une interdiction de la doctrine copernicienne. Mais il lui manque la preuve irréfutable de la rotation de la Terre pour appuyer ses plaidoiries. Son intervention arrive trop tard : Lorini, par lettre de dénonciation, avait déjà prévenu Rome de l'arrivée de Galilée et le Saint-Office avait déjà commencé l'instruction de l'affaire.
Cherchant toujours une preuve du mouvement de la Terre pour répondre aux objections du cardinal Bellarmin, Galilée pense la trouver dans le phénomène des marées. Le 8 février 1616, il envoie sa théorie des marées (Discorso del Flusso e Reflusso) au cardinal Orsini. Cette théorie rappelle la relation entre les marées et la position apparente de la Lune, qui tourne moins vite autour de la Terre (28 jours) que la Terre n'est supposée tourner sur elle-même (1 jour). Malheureusement, Galilée ne peut expliquer ainsi qu'une marée par jour alors qu'il en est couramment observé deux, parfois avec un peu de décalage sur l'heure astronomique qui ne sera expliqué que plus tard par la dynamique des fluides. Elle reste en revanche compatible avec le principe d'inertie admis par Galilée. L'influence de la Lune sur les marées avait déjà été soulignée par Kepler, mais Galilée n'en avait pas alors tenu compte. Il fallu attendre l'année 1728 et les observations de Bradley sur l'aberration de la lumière pour avoir une première preuve directe du mouvement de la Terre par rapport aux étoiles.
L'intransigeance de Galilée, qui refuse l'équivalence des hypothèses copernicienne et ptoléméenne, probablement en vertu du rasoir d'Occam, a sans doute précipité les évènements. De fait, sur la question de la translation de la terre et de sa rotation sur elle-même, les arguments décisifs n'ont été acquis qu'au début du XIXe siècle. L'équivalence des hypothèses était la conclusion rationnelle justifiée pour l'époque; et non l'affirmation d'une réalité physique telle que soutenue par Galilée. En présentant sa théorie comme une vérité absolue (ce qui transforme sa cosmologie en une cosmogonie), Galilée se place dans le domaine de la Foi, ce qui justifie l'intervention de la censure. Une étude du procès par le philosophe des science Paul Feyerabend (voir par exemple dans Adieu la Raison) montre que l'attitude de l'inquisiteur Robert Bellarmin fut au moins aussi scientifique que celle de Galilée, même suivant des critères modernes: une cosmologie (qu'elle soit d'ailleurs copernicienne ou ptoléméenne) ne peut qu'être une théorie, sans pouvoir prétendre à la Vérité. Cependant, cette distinction entre théorie et Vérité, que notre époque moderne perçoit mieux, était trop nouvelle pour l'époque; l'acte d'accusation de Galilée fait lui-même la confusion en reprochant à Galilée de tenir pour vrai l'héliocentrisme, non pas parce que ce n'est qu'une théorie, mais parce que cette thèse est « naïve et absurde en philosophie, et formellement hérétique en tant que contredisant explicitement le sens de nombreux passage des Saintes Écritures ».
Malgré deux mois passés à remuer ciel et terre pour empêcher l'inévitable, il est convoqué le 16 février 1616 par le Saint-Office pour l'examen des propositions de censure. C'est une catastrophe pour lui. Les 25 février et 26 février 1616, la censure est ratifiée par l'Inquisition et par le pape Paul V. La théorie copernicienne est condamnée. Galilée n'est pas inquiété personnellement mais est prié d'enseigner sa thèse en la présentant comme une hypothèse. Cet arrêté s'étend à tous les pays catholiques.
Progrès des thèses de Galilée
Cette affaire a beaucoup éprouvé Galilée. Ses maladies reviennent le tourmenter pendant les deux années suivantes et son activité scientifique se réduit. Il reprend seulement son étude de la détermination des longitudes en mer. Ses deux filles entrent dans les ordres.
En 1618, on observe le passage de trois comètes, phénomène qui relance la polémique sur l'incorruptibilité des cieux.
En 1619, le père jésuite Horatio Grassi publie De tribus cometis anni 1618 disputatio astronomica. Il y défend le point de vue de Tycho Brahé sur les trajectoires elliptiques des comètes. Galilée riposte d'abord par l'intermédiaire de son élève Mario Guidicci qui publie en juin 1619 Discorso delle comete où il développe une théorie farfelue sur les comètes, allant jusqu'à en faire des phénomènes météorologiques.
En octobre, Horatio Grassi attaque Galilée dans un pamphlet plus sournois : aux considérations scientifiques se mêlent des insinuations religieuses malveillantes et très dangereuses au temps de la Contre-Réforme.
Cependant, Galilée, encouragé par son ami le cardinal Barberini (futur pape Urbain VIII) et soutenu par l'Académie des Lynx, y répondra avec ironie dans Il Saggiatore (ou L'Essayeur). Grassi, l'un des plus grands savants jésuites, sera ridiculisé.
Lorsque Peiresc, ami et ancien élève de Galilée, apprend qu'il est inquiété, il envoie une lettre au cardinal Barberini. .
Entre-temps, Galilée a repris son étude des satellites de Jupiter. Malheureusement des difficultés techniques l'obligent à abandonner le calcul de leurs éphémérides. Galilée se voit couvert d'honneurs en 1620 et 1622.
Le 28 août 1620, le cardinal Maffeo Barberini adresse à son ami le poème Adulatio Perniciosa qu'il a composé à son honneur. Le 20 janvier 1621, Galilée devient consul de l'Accademia fiorentina. Le 28 février, Cosme II, le protecteur de Galilée, meurt subitement.
En 1622, à Francfort, paraît une Apologie de Galilée rédigée par Tommaso Campanella en 1616. Un défenseur bien encombrant, car Campanella est déjà convaincu d'hérésie.
Le 6 août 1622, le cardinal Maffeo Barberini est élu Pape sous le nom de Urbain VIII. Le 3 février 1623 Galilée reçoit l'autorisation de publier son Saggiatore qu'il dédie au nouveau Pape. L'ouvrage paraît le 20 octobre 1623. Ce sont d'abord les qualités polémiques (et littéraires) de l'ouvrage qui assureront son succès à l'époque. Il n'en demeure pas moins qu'en quelques mois et dans une atmosphère de grande effervescence culturelle, Galilée devient en quelque sorte le porte-drapeau des cercles intellectuels romains en rébellion contre le conformisme intellectuel et scientifique imposé par les Jésuites.
Les années suivantes sont assez calmes pour Galilée malgré les attaques des aristotéliciens. Il en profite pour perfectionner son microscope composé (septembre 1624).
En 1626, Galilée poursuit ses recherches sur l'armature de l'aimant. Il reçoit aussi la visite d'Élie Dodati, qui apportera les copies de ses manuscrits à Paris. En 1628, Galilée tombe gravement malade et manque de mourir en mars.
L'année suivante, ses adversaires tentent de le priver de l'allocation qu'il reçoit de l'Université de Pise, mais la manœuvre échoue.
Le Dialogue et la condamnation de 1633
Dans les années 1620, après la censure de ses thèses, Galilée passe un mois à Rome où il est reçu plusieurs fois par le pape Urbain VIII. Ce dernier lui soumet l'idée de son prochain livre Dialogue sur les deux grands systèmes du monde, ouvrage qui présenterait de façon impartiale à la fois le système aristotélicien et le système copernicien. Il charge Galilée de l'écrire.
Jusqu'en 1631 Galilée consacre son temps à l'écriture du Dialogo et à tenter de le faire admettre par la censure. L'ouvrage est achevé d'imprimer en février 1632. Les yeux de Galilée commencent à le trahir en mars et avril.
Le 21 février 1632, Galilée, protégé par le pape Urbain VIII et le grand-duc de Toscane Ferdinand II de Médicis, petit-fils de Christine de Lorraine, fait paraître à Florence son dialogue des Massimi sistemi (Dialogo sopra i due massimi sistemi del mondo]], Dialogue sur les deux grands systèmes du monde), où il raille implicitement le géocentrisme de Ptolémée.
Ce Dialogue est à la fois une révolution et un scandale. Le Dialogue se déroule à Venise sur quatre journées entre trois interlocuteurs : Filippo Salviati, un Florentin partisan de Copernic, Giovan Francesco Sagredo, un Vénitien éclairé mais sans a priori, et Simplicio, un piètre défenseur de la physique aristotélicienne, un personnage dans lequel Urbain VIII se serait (peut-être) reconnu. Mais, lorsqu'on lui reprocha le caractère ostensiblement péjoratif du nom, Galilée répondit qu'il s'agissait de Simplicius de Cilicie.
Le pape lui-même se range donc vite à l'avis des adversaires de Galilée : il lui avait demandé une présentation objective des deux théories, pas un plaidoyer en faveur de Copernic.
Galilée est donc à nouveau convoqué par le Saint-Office, le 1er octobre 1632. Ce qui lui est reproché n'est pas sa thèse elle-même, mais de ne pas respecter une décision de justice - ce qui justifie des sanctions pénales (encore de nos jours). Son livre est en effet ouvertement pro-copernicien, bafouant l'interdit de 1616 (la mise à l'index de ces thèses ne sera levée qu'en 1757). Malade, il ne peut se rendre à Rome qu'en février 1633. Les interrogatoires se poursuivent jusqu'au 21 juin où la menace de torture est évoquée sur ordre du pape ; Galilée cède.
Le 22 juin 1633, au couvent dominicain de Santa-Maria, la sentence est rendue : Galilée est condamné à la prison à vie (peine immédiatement commuée en résidence à vie par Urbain VIII) et l'ouvrage est interdit. Il prononce également la formule d'abjuration que le Saint-Office avait préparée :
« Moi, Galiléo, fils de feu Vincenzio Galilei de Florence, âgé de soixante dix ans, ici traduit pour y être jugé, agenouillé devant les très éminents et révérés cardinaux inquisiteurs généraux contre toute hérésie dans la chrétienté, ayant devant les yeux et touchant de ma main les Saints Évangiles, jure que j'ai toujours tenu pour vrai, et tiens encore pour vrai, et avec l'aide de Dieu tiendrai pour vrai dans le futur, tout ce que la Sainte Église Catholique et Apostolique affirme, présente et enseigne. Cependant, alors que j'avais été condamné par injonction du Saint Office d'abandonner complètement la croyance fausse que le Soleil est au centre du monde et ne se déplace pas, et que la Terre n'est pas au centre du monde et se déplace, et de ne pas défendre ni enseigner cette doctrine erronée de quelque manière que ce soit, par oral ou par écrit; et après avoir été averti que cette doctrine n'est pas conforme à ce que disent les Saintes Écritures, j'ai écrit et publié un livre dans lequel je traite de cette doctrine condamnée et la présente par des arguments très pressants, sans la réfuter en aucune manière; ce pour quoi j'ai été tenu pour hautement suspect d'hérésie, pour avoir professé et cru que le Soleil est le centre du monde, et est sans mouvement, et que la terre n'est pas le centre, et se meut. [...][2] »
Galilée n'a jamais prononcé le fameux « Et pourtant elle tourne » (Eppur si muove).
Le texte de la sentence est diffusé largement : à Rome le 2 juillet, le 12 août à Florence. La nouvelle arrive en Allemagne fin août, en Belgique en septembre. Les décrets du Saint-Office ne seront jamais publiés en France, mais, prudemment, René Descartes renonce à faire paraître son Monde.
Beaucoup (y compris Descartes), à l'époque, pensèrent que Galilée était la victime d'une cabale des Jésuites qui se vengeaient ainsi de l'affront subi par Horatio Grassi dans le Saggiatore.
Les positions du théologien liégeois Libert Froidmont (de l'Université de Louvain) éclairent bien toute l'équivoque de la condamnation de Galilée.
La fin
D'abord assigné à résidence chez l'archevêque Piccolomini à Sienne, il obtient finalement d'être relégué chez lui, à Florence dans sa villa d'Arcetri[3], la Villa le Gioiello[4], non loin de ses filles au couvent. L'interdiction de rendre visite au « prisonnier d'Arcetri » qui s'assouplit ensuite lui permet de recevoir quelques visites, ce qui lui permet de faire passer la frontière à quelques ouvrages en cours de rédaction. Ces livres paraissent à Strasbourg et à Paris en traduction latine.
En 1636, Louis Elzevier reçoit une ébauche des Discours sur deux sciences nouvelles de la part du maître florentin. C'est le dernier livre qu'écrira Galilée, ouvrage où le scientifique a consigné les découvertes d'où est née la dynamique moderne ; il y établit les fondements de la mécanique en tant que science et marque ainsi la fin de la physique aristotélicienne. Il tente aussi de poser les bases de la Résistance des matériaux, avec moins de succès. Il finira ce livre de justesse, car le 4 juillet 1637, il perd l'usage de son œil droit.
Le 2 janvier 1638, Galilée perd définitivement la vue. Par chance, Dino Peri a reçu l'autorisation de vivre chez Galilée pour l'assister avec le père Ambrogetti qui prendra note de la sixième et dernière partie des Discours. Cette partie ne paraîtra qu'en 1718. L'ouvrage complet paraît en juillet 1638 à Leyde (Pays-Bas) et à Paris. Il est lu par les grands esprits de l'époque. Descartes par exemple enverra ses observations à Mersenne, l'éditeur parisien.
Il restera à Arcetri jusqu'à sa mort, entouré de ses disciples (Viviani, Torricelli, Peri, etc.), travaillant à l'astronomie et autres sciences. Fin 1641, Galilée envisage d'appliquer l'oscillation du pendule aux mécanismes d'horloge.
Quelques jours plus tard, le 8 janvier 1642, Galilée s'éteint à Arcetri, une petite colline au sud de Florence, à l'âge de 78 ans. Son corps est inhumé religieusement à Florence le 9 janvier dans le caveau familial de l'église de Santa Croce de Florence. Un mausolée sera érigé en son honneur le 13 mars 1736.
Postérité : de l'incompréhension des scientifiques à l'hommage de l'Église
Le procès de Galilée, spécialement pour son ouvrage Dialogue sur les deux grands systèmes du monde (1633), a eu des retombées considérables sur la méthode scientifique, tant la méthode expérimentale que théorique, mais aussi indirectement sur la philosophie et d'autres domaines de la pensée. En philosophie, on vit ainsi apparaître des courants de pensée rationalistes (Descartes), et empiriques (voir Francis Bacon, mais aussi Robert Boyle). Ces retombées sont détaillées dans l'article Révolution copernicienne. Nous nous bornons ici à en décrire les grandes lignes.
XVIIe siècle: réactions des scientifiques
La théorie de l'héliocentrisme, souleva d'abord des questions d'interprétation des textes bibliques (Terre fixe au centre de l'univers), et de métaphysique, qui entraînèrent des réactions des scientifiques :
- Descartes se lança dans un projet philosophique (cogito), et dans les méditations sur la philosophie première (1641), dénonça la philosophie d'Aristote et la scolastique (Thomas Hobbes ne le suivit pas sur ce point)
- Blaise Pascal rejoignit le courant janséniste, et participa avec une équipe de Port-Royal à une traduction de la Bible sous la direction de Lemaître de Sacy, qui fut la seule traduction de la Bible en français au XVIIe siècle.
XVIIIe siècle : le pape Benoît XIV autorise les ouvrages sur l'héliocentrisme
Le pape Benoît XIV autorisa les ouvrages sur l'héliocentrisme dans la première moitié du XVIIIe siècle, et ceci en deux temps :
- En 1741, devant la preuve optique de l'orbitation de la Terre faite par Bradley en 1728, il fit donner par le Saint-Office l'imprimatur à la première édition des œuvres complètes de Galilée, avec cependant l'ajout du fait que le mouvement de la Terre est supposé. Ce geste constitua une révision implicite des sentences de 1616 et 1633, même si celles-ci ne furent pas abrogées.
- En 1757, les ouvrages favorables à l'héliocentrisme furent à nouveau autorisés, par un décret de la Congrégation de l'Index, qui retira ces ouvrages du catalogue des livres interdits.
Il y eut encore peu de traductions de la Bible en français, mais on commença à faire des travaux d'exégèse à partir des textes anciens.
XIXe siècle : les travaux d'exégèse s'intensifient
Les protestants travaillèrent sur l'Ancien Testament, tandis que les catholiques s'attelèrent au Nouveau Testament. Le pape Léon XIII indiqua les règles à adopter pour les études bibliques (encyclique Providentissimus deus de 1893). 19 traductions de la Bible en français parurent au XIXe siècle.
XXe siècle : les papes modernes rendent hommage au savant
Tous les papes modernes ont rendu hommage au grand savant qu'était Galilée, et ont publiquement reconnu que certaines interventions de l'Église dans le domaine scientifique étaient indues.
De nouvelles traductions de la Bible apparaissent dans la deuxième moitié du XXe siècle, tenant compte des études bibliques (exégèse et herméneutique) lancées par les papes Léon XIII et Pie XII (qui ne s'est pas offusqué de la théorie du big bang, voir Pie XII et le Big Bang).
En 1979 et en 1981, le pape Jean-Paul II chargea une commission d'étudier la controverse ptoléméo-copernicienne des XVIe-XVIIe siècle. Jean-Paul II considèra qu'il ne s'agissait pas d'une réhabilitation. Celle-ci est d'ailleurs implicite après les autorisations données par Benoît XIV en 1741 et en 1757.
Le 31 octobre 1992, Jean-Paul II rend une nouvelle fois hommage au savant lors de son discours aux participants à la session plénière de l'Académie pontificale des sciences[5]. Il a reconnu clairement les erreurs de certains théologiens du XVIIe siècle dans l'affaire :
« Ainsi la science nouvelle, avec ses méthodes et la liberté de recherche qu'elle suppose, obligeait les théologiens à s'interroger sur leurs propres critères d'interprétation de l'Écriture. La plupart n'ont pas su le faire. »
« Paradoxalement, Galilée, croyant sincère, s'est montré plus perspicace sur ce point que ses adversaires théologiens. « Si l'écriture ne peut errer, écrit-il à Benedetto Castelli, certains de ses interprètes et commentateurs le peuvent, et de plusieurs façons ». On connaît aussi sa lettre à Christine de Lorraine (1615) qui est comme un petit traité d'herméneutique biblique. »
XXIe siècle
En octobre 2005, le livre du cardinal Paul Poupard sur l'affaire Galilée est publié. La même année, Francesco Beretta, l'un des spécialistes de la question, donne un cours sur l'affaire Galilée au Centre Alexandre Koyré[6].
En janvier 2008, une controverse éclate entre 67[7] professeurs de l'Université de Rome « La Sapienza » soutenus par des étudiants et le pape Benoît XVI, au point que ce dernier doit renoncer à participer à la cérémonie d'inauguration de l'année universitaire à laquelle il avait été convié. Ces professeurs reprochent au pape sa position sur l'affaire Galilée telle qu'elle était apparue dans un discours prononcé par lui à Parme en 1990[8], dans lequel il s'appuie sur l'interprétation du philosophe des sciences Paul Feyerabend jugeant la position de l'Église d'alors plus rationnelle que celle de Galilée[9]. Une manifestation en soutien du pape réunit 100 000 fidèles sur la place Saint-Pierre le 20 janvier 2008[7].
Hommages à Galilée
- l'astéroïde (697) Galilea a été nommé en son honneur, à l'occasion du 300e anniversaire de sa découverte des lunes galiléennes ;
- Galileo est le nom d'une sonde de la NASA envoyée vers Jupiter et ses satellites ;
- l'institut Galilée est un pôle scientifique constitué de huit laboratoires de recherche, quatre formations d'ingénieurs et une école doctorale ;
- La Haute Ecole Galilée est un établissement d'enseignement supérieur bruxellois dans le domaine de la communication (master journalisme, publicité, ...), des soins infirmiers (bachelier en soins infirmiers), de l'enseignement (bachelier régent de l'enseignement secondaire inférieur, ...) et du secteur économique (bachelier en secrétariat de direction et bachelier en tourisme) ;
- Galileo est aussi le futur système de positionnement européen ;
- La vie de Galilée est une pièce de théâtre de Bertolt Brecht ;
- la vie de Galilée fait également l'objet d'un album du groupe de Metal Allemand Haggard avec l'opus « Eppur Si Muove » qui lui est entièrement consacré ;
- en 2005, un téléfilm français, Galilée ou l'amour de Dieu est réalisé par Jean-Daniel Verhaeghe, avec Claude Rich dans le rôle de Galilée. Ce film retrace son procès en Inquisition ;
- Galilée, opéra en 12 scènes de Michael Jarrell (livret du compositeur d'après La Vie de Galilée de Bertolt Brecht), est créé à Genève en janvier 2006.
Citation
« La philosophie [au sens de science(s) de la nature] est écrite dans ce livre gigantesque qui est continuellement ouvert à nos yeux (je parle de l'Univers), mais on ne peut le comprendre si d'abord on n'apprend pas à en comprendre la langue et à en connaître les caractères dans lesquels il est écrit. Il est écrit en langage mathématique, et les caractères en sont des triangles, des cercles, et d'autres figures géométriques, sans lesquelles il est impossible d'y comprendre un mot. Dépourvu de ces moyens, on erre vainement dans un labyrinthe obscur. »
— Il saggiatore, en français L'Essayeur
Œuvres
- Principaux ouvrages scientifiques
- 1606 : le Operazioni del compasso geometrico et militare di Galileo-Galilei, nobil Fiorentino.
- 1610 : Discorso intorno alle cose che stanno in su l'acqua et che in quella si muovono.
- 1610 : Sidereus Nuncius, magna longeque admirabilia spectacula prodens, etc.
- 1613 : Storia e dimonstrazioni intorno alle macchie solari et loro accidenti, dal signor Galileo-Galilei.
- 1623 : il Saggiatore nel quale con bilancia esquisita et giusta si ponderano le cose contenute nella libra astronomica et filosofica di Lotario Sarsi, etc.
- 1638 : Discorsi e Dimonstrazioni matematiche intorno a due scienze attenanti alla mecanica ed i movimenti locali.
- Bibliographie
- Galilée, Lettre à Christine de Lorraine et autres écrits coperniciens, traduction par Philippe Hamou et Martha Spranzi. Paris, Librairie générale française, 2004. (ISBN 2-253-06764-4).
- Galilée, L'Essayeur, traduction par Christine Chauviré. Paris, les Belles Lettres, 1979. (Annales littéraires de l'Université de Besançon ; 234). (ISBN 2-251-60234-8).
- Galileo Galilei, Le Messager des étoiles, traduction annotée par Fernand Hallyn. Paris, Seuil, 1992 (Sources du savoir). (ISBN 2-02-014593-6).
- Galileo Galilei, Sidereus nuncius. Le messager céleste, texte et traduction par Isabelle Pantin. Paris, les Belles Lettres, 1992. (Science et humanisme). (ISBN 2-251-34505-1) ;
- Galileo Galilei, Dialogue sur les deux grands systèmes du monde, publié en 1632, traduction par René Fréreux et François de Gandt. Paris, Seuil, Points Sciences, 2000. (ISBN 2-02-041635-2) ;
- Galilée, Discours concernant deux sciences nouvelles, traduction par Maurice Clavelin. Paris, PUF 1995. (ISBN 2-13-046854-3) (repris de A.Colin 1970). Les quatre premières journées seulement. La sixième journée a été publiée par S. Moscovici dans la revue Isis.
Anecdotes
Au Musée de la Storia della Scienza (Histoire des Sciences) de Florence, près des Offices : vitrines consacrées à de nombreux instruments de Galilée, également la relique momifiée de l'index de Galilée, celui-là même ayant désigné les astres qu'il voyait avec sa lunette.
À Padoue, l'Université de « la Bô » conserve à l'académie l'épine dorsale de Galilée ; ce qui fait écrire à André Suarès, dans son Voyage du Condottière :
« Peuple à reliques : ils ont aussi l'épine dorsale de Galilée, à l'Académie, en rien différente d'une autre épine, un os à moelle pour le pot-au-feu du dimanche. Il faudrait mettre le tout dans un tronc à la Sainte Science ou à Saint Antoine. »
— page 119, éditions Émile-Paul
Bibliographie
- La vérité sur l'affaire Galilée, Aimé Richardt, François-Xavier de Guibert, 2007.
- La vie de Galilée, de Bertolt Brecht (pièce de théâtre)
- Exorciser le spectre de Galilée, par Philippe Marcille, Éditions du Sel, 2006.
- L'affaire Galilée, cardinal Poupard, éditions de France, octobre 2005,
- Galilée en procès, Galilée réhabilité ?, sous la direction de Francesco Beretta. Saint-Maurice, Éditions Saint-Augustin, 2005. (ISBN 2-88011-369-5).
- Galilée copernicien, de Maurice Clavelin. Paris, Albin Michel, 2004. (ISBN 2-226-14235-5).
- Sur les épaules des géants, de Stephen Hawking, éditions Dunod, 2003 ;
- Le mythe Galilée, Fabien Chareix, PUF, 2002 ;
- Galilée, de Claude Allègre, éditions Plon, 2002 ;
- La Fille de Galilée, Dava Sobel, Éditions Odile Jacob, 2001 (ISBN 978-2738109507) ;
- Galilée de Georges Minois. Paris, PUF, 2000. (Que sais-je ? n° 3574). (ISBN 2-13-050919-3).
- Lerner (Michel Pierre), Pour une édition critique de la sentence et de l'abjuration de Galilée, in : Revue des sciences philosophiques et théologiques 82-4 (Paris 1998), p. 607-629.
- Galilée, de Ludovico Geymonat Turin (1957), traduction française coll. Sciences, Seuil (1992), biographie (ISBN 202014753X)
- Shea (William R.), La révolution galiléenne. De la lunette au système du monde ; trad. de la 2e éd. anglaise par François de Gandt. Paris, éd. du Seuil, 1992. (Science ouverte). 313p. (ISBN 2-02-012417-3).
- Stengers (Isabelle), Les affaires Galilée, dans Michel Serres (dir.), Éléments d'Histoire des sciences, Paris, Bordas, p. 223-273. (ISBN 2-04-018467-8).
- Galileo, courtier : the practice of science in the culture of absolutism de Mario Biagioli, Chicago, University of Chicago Press, 1993.
- Galilée hérétique de Pietro Redondi. Paris, Gallimard, 1985. (Bibliothèque des Histoires). (ISBN 2-07-070419-X).
- Galileo Galilei, 350 ans d'histoire (1633-1983), ouvrage collectif sous la direction de Mgr Poupard, Desclée International, Tournai 1983.
- Shea (William R.), Galileo, Scheiner, and the Interpretation of Sunspots, Isis 61, 1970, p. 498-519.
- Études galiléennes d'Alexandre Koyré. Paris, Hermann, 1966. (Histoire de la pensée ; 15).
- Galileo Galilei, School of Mathematics and Statistics - University of St Andrews ;
- The Galileo Project, Rice University ;
- Et pourtant elle tourne (la vie de Galilée) de Zsolt Harsanyi, adaptation française de Muller-Strauss, éd. Calmann-Lévy (1947)
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Source : Galileo Galilei sur Wikipedia
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